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LE RÊVE ET LA PLUME : PAR L’ÉCRITURE, LA LIBERTÉ

Depuis leur création par Christian GARRABOS, il y a près de 15 ans, les ateliers d’écriture du « Rêve et de la plume » ont connu bien des formes et itérations, mais ont toujours été animés par une même intention : accompagner leurs participants sur les chemins de l’inspiration, en cultivant et surtout en partageant le plaisir d’écrire.

« C’est en forgeant qu’on devient forgeron » dit l’adage, et « en écrivant que l’on se découvre écrivain » pourrait-on rajouter au sein de ces ateliers. Ressentir puis, par les mots, retranscrire, le meilleur moyen de dépasser ses appréhensions et libérer la sensibilité artistique qui réside en chacun de nous. Une démarche suivie par Christian lui-même dans sa jeunesse et un fil rouge qui le guida tout au long de sa carrière professionnelle et associative, qu’il s’évertue aujourd’hui à partager avec les artistes en herbe qui viennent colorer ses ateliers de leurs mots à eux.

 

DÉSAPPRENDRE A ÉCRIRE

« Je suis très exemplaire du fait que tout le monde peut se mettre à écrire confie Christian. Adolescent, j’étais un piètre élève en français, incapable d’écrire une carte postale, se souvient-il, sourire en coin. A dire vrai je considérais que je n’avais rien à dire d’intéressant et encore moins d’une belle façon. Puis j’ai eu ressenti l’envie de dire des choses et de les écrire, sans vraiment réfléchir à la forme. Alors je me suis lancé et ai commencé à m’intéresser plus avant à la littérature. En quelques mois, je suis passé du statut de cancre à celui de premier de la classe.

On ne peut pas dire à quelqu’un qu’il n’est pas fait pour l’écriture ou quoi que ce soit d’autre, ce dont j’étais pourtant persuadé. Car on nous enseigne une façon de faire, avec des règles précises, des attendus scolaires qui peuvent miner la confiance en soi. D’ailleurs, l’enseignement est marqué par la culture de la faute, de l’erreur et non de la valorisation des élèves. C’est pourquoi il faut savoir remettre en cause ce qu’on nous inculque et s’émanciper des méthodologies, rigides ou trop dogmatiques.

Je n’ai pas suivi d’études littéraires, raison pour laquelle, entre autres, je qualifierai mon écriture d’expérimentale. D’abord parce que c’est de façon empirique que j’ai travaillé mon écriture, ensuite car je n’ai pas essayé de reproduire des « attendus » tels qu’on pourrait les enseigner, c’est même l’objectif inverse qui anime ma démarche : je cherche à me défaire de ces préceptes, règles et autres marques d’un enseignement dogmatique. Notre société toute entière est fondée sur et par les dogmes, qu’ils soient religieux, politiques ou commerciaux. Écrire pour moi, c’est d’abord se libérer de ces dogmes pour libérer sa propre créativité et non reproduire des attendus, formatés et donc aseptisés. J’ai voulu créer une écriture qui soit mienne, avec ma propre esthétique, une écriture « efficace ».

C’est cette façon d’aborder l’écriture, cette démarche créative que je m’évertue le plus à transmettre aux participants des ateliers de l’encre et la plume. »

 

SPORT ET LITTÉRATURE, LES DEUX BOUTS D’UNE MÊME PASSION

C’est un cursus en études physiques et en management que suit Christian pendant ses années estudiantines. Cela ne l’empêchera pas de toujours cultiver ce goût et cette envie de lire et surtout d’écrire. Féru de sport en général et de rugby en particulier, Christian allie ses deux passions en lisant assidument les pages de L’Equipe. « La rédaction comptait par le passé de très grandes plumes, à l’image de Denis LALANDE, Henri GARCIA ou encore Antoine BLONDIN. » Des évocations qui au sortir de sa bouche, laissent entrevoir la profonde estime et l’admiration que Christian leur porte.  

A 20 ans, accompagné par 2 de ses amis étudiants, il crée une véritable revue, imprimée à Toulouse. « Il y avait dans les années 70 un foisonnement d’initiatives dans ce genre, un bouillonnement créatif et culturel. Diplôme d’études physique en poche, Christian passe le MBA d’HEC, « une bêtise, confie-t-il, mais qui m’a permis de rentrer dans le monde du sport professionnel, par exemple en tant que membre du comité national olympique du sport français. Pendant cette période il conçoit une seconde revue, « stadium » consacrée au sport. « Je suis tout particulièrement attaché aux valeurs du sport, qui m’habitent et qui m’élèvent : communion, rêve, respect, le sport a ce pouvoir de faire vibrer les gens au diapason d’une même passion. Malgré toutes les affres et dérives qui peuvent toucher des aspects du sport pro, cette essence, cette passion reste intacte. On ne consomme pas le sport, on le vit ensemble. »

En parallèle de ces réalisations, Christian travailla aussi dans un groupe de presse consacré à l’évènementiel, notamment en tant que rédacteur au sein de la revue officielle de Roland Garros.

Non content de créer des revue dédiées, l’auteur a également signé plusieurs livres dédiés au sport et à ses valeurs. « C’est par empirisme, en pratiquant l’écriture que j’ai développé mes aptitudes littéraires. Mon premier livre, faisait 548 pages, inutile de vous dire que j’en fus le premier surpris. Jamais je ne me serais pensé capable de réussir un tel ouvrage. ».

 

VERS LA CRÉATION ROMANESQUE

Gouts littéraires

Balzac, Dumas, Maurice Leblanc, Frédéric Dard, les goûts et références littéraires de Christian sont marqués par l’ouverture et l’éclectisme. « J’aime autant lire les grands noms du patrimoine littéraire français que les auteurs plus populaires, comme Dard (le géniteur des fameux « SAS »), dont la plume ressemble beaucoup à l’esthétique cinématographique d’un Audiard. » 

 

Écriture romanesque

Malgré ses réalisations en tant qu’auteur de livres sportif et de nombreux articles dans divers revues et journaux consacrés à cette même thématique, Christian entretenait l’idée que l’écriture romanesque n’était tout simplement pas faite pour lui. « J’avais cette idée ancrée au fond de moi, qu’écrire un roman était hors de portée ».  

C’est au milieu d’une compétition de saut en hauteur que l’auteur brise ce plafond de verre : « Alors que j’étais en plein saut, j’ai eu l’impression de voler avec le temps qui se distendait autour de moi. C’est cette sensation que j’ai voulu retranscrire avec ma plume. » Une expérience intense qui marque un tournant pour Christian. « Selon moi l’écriture ne vient pas ex nihilo, elle doit trouver sa source dans les émotions et ressentis. Ecrire c’est mettre en œuvre une capacité à rentrer à l’intérieur des choses pour leur donner une épaisseur. Il s’agit de puiser dans ces ressources infinies que sont les émotions, les souvenirs, les ressentis et de donner corps à cette matière, à l’image de la fameuse madeleine de Proust. Il ne s’agit surtout pas là d’un exercice intellectuel. »

 

Être au monde, être aux autres, écrire la relation

« Notre relation au monde et aux autres passe d’abord par nos sens. C’est par leur intermédiaire que le réel se donne à voir, sentir, vivre. » C’est dans ce rapport, cette relation, que Christian propose aux participants de ses ateliers de puiser leur inspiration. « Nous vivons aujourd’hui une époque à la fois hyper connectée, où tout va très vite, où l’information est instantanée mais c’est précisément cette vitesse permanente qui nous arrache au monde. Nous vivons dans un processus d’ahurissement où l’on ne prend plus le temps de se poser. Quel que soit le thème de nos ateliers, ils invitent d’abord à rompre avec cette temporalité. Écouter pour entendre, regarder pour voir, humer pour ressentir, ce sont là des postures nécessaires pour saisir le réel, ressentir sa moelle, percevoir les choses au-delà de leur apparence. Et encore une fois, cela ne passe pas par la réflexion, du moins pas de prime abord, mais par les sens. Ecrire implique avant tout de parvenir à saisir la matière qui se fera ensuite l’objet de l’écrit.

En tant que journaliste, je savais écrire, mais les exigences du métier impliquent une rédaction concise et répondant à des codes, efficace en somme. Lorsque je me suis lancé dans la rédaction de ma première nouvelle, j’ai voulu rompre avec ce style, m’émanciper de cette écriture. Je suis parti d’expérience intime, avec l’idée de décrire et restituer des sensations charnelles, telles que je les avais ressenties, vécues. J’ai écrit cette nouvelle en 9h, au fil de la plume. »

 

Stimuler la sensibilité artistique de chacun

Après avoir écrit ses deux nouvelles, Christian s’est inscrit à des ateliers d’écriture, désireux de cultiver ce plaisir découvert lors de ses expériences en tant qu’auteur. Mais l’expérience n’est pas à la hauteur de ses expectatives. « Je me suis heurté à un enseignement théorique qui a surtout suscité chez moi de l’ennui, là où j’avais pris plaisir à apprendre par la pratique. »

Raison pour laquelle il décide de se lancer, après avoir suivi 3 années de stages dédiés dans l’animation d’ateliers d’écriture reflétant sa propre expérience. A l’image de l’écriture instinctive et spontanée d’un Jack KEROUAC (Sur la route), Christian invite ainsi les participants de ses ateliers à ressentir puis restituer les sensations et pensées qui les traversent. Pour ce faire, l’auteur propose des ateliers thématiques à même de stimuler les sens ou réveiller les souvenirs en chacun : « l’idée repose sur le fait de sortir, d’aller chercher l’expérience, pour écrire au plus près des choses : stimuler l’imaginaire pour nourrir la matière littéraire.

Récemment, les ateliers du rêve et la plume embarquaient ses participants le temps de journées thématiques, comme par exemple lors d’une excursion à Guétary : « on arrive à l’océan et prenons en groupe un café. La proposition est alors d’écrire sur ce qui a été éprouvé, comme par exemple le cheminement, le voyage, les humeurs nomades voguant et s’échouant sur les rivages : les ressentis, émotions et pensées surgis durant ce temps-là. On donne une contrainte de 20 minutes et chacun couche par écrit ce qui l’a traversé, avant de le partager avec le groupe. Si elle peut paraître contraignante, cette limite de temps est en réalité libératrice : elle permet de dépasser les freins psychologiques qui entravent la créativité : on se libère d’un poids, celui de notre propre jugement ou a priori sur nous-mêmes et notre capacité rédactionnelle. On débranche le cerveau et se connecte à nos tripes. Notre esprit est véritablement pollué par les peurs, les échecs, les publicités et leur violence sous-jacentes en terme d’injonctions sur ce que nous devrions être…

 

Pédagogie de la bienveillance

A l’inverse d’une dictée où l’on relève les fautes commises, l’idée des ateliers est de valoriser les productions de chacun. Cela passe d’abord par le plaisir du groupe à lire et écouter les textes de chacun. S’instaure naturellement un climat non jugeant, non évaluant, toute considération de note ou de compétition étant aux abonnés absents. C’est tout l’inverse qui se produit, on relève le positif dans toutes les propositions et on s’intéresse sincèrement à la création de chacun. Personne ne se compare aux autres puisque chacun de nous est unique dans sa sensibilité et ses ressentis. Partager cette dimension intime avec les autres invite aux rapprochement et à la communion dans l’émotion. D’ailleurs les retours des participants sont sans équivoques, beaucoup confient qu’ils ne se pensaient pas capable d’écrire ce qu’ils viennent de lire aux autres, et témoignent d’une réelle gratitude à cet égard. Il s’agit de mettre tout le monde en confiance, de créer un espace où non seulement on se sent encouragé et valorisé mais où l’on partage quelque chose d’inestimable, qui reste et apporte énormément de bien-être. J’ai vécu des moments véritablement extraordinaires en ce sens ».

Christian se souvient ainsi de cette journée où s’était improvisé un atelier au sein d’un centre social. « Les gens n’étaient pas du tout venus pour ça, ils suivaient simplement diverses animations proposées alors. Le thème de l’atelier portait sur la parentalité et les participants étaient de tout âge, certains étaient avec leurs enfants ou leurs aînés. Au fur et à mesure que les gens lisaient leur petite production écrite, parfois simplement constituée de quelques lignes, tout le monde s’est mis à pleurer, avec une émotion palpable. Tout simplement car ce qui était lu et décrit portait sur des choses simples, vécues, authentiques et qu’elles résonnaient chez les autres. Il y a aussi dans ces expériences une dimension libératrice, d’exutoire, où l’on se surprend à émouvoir son voisin et de soi-même ressentir ce qu’il nous lit en retour. Ce sont alors des expériences au pouvoir extrêmement réconfortant, qui font du bien tout simplement.

 

 

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