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CASSANDRE ET LE MINOTAURE : une exposition choc au Laü

Jusqu’au 15 décembre, le Laü reçoit une exposition à la forme originale, sur le thème des violences conjugales. Proposée à l’initiative de Thérèse AUCLAIR, représentante de la maison des femmes au sein du réseau FIA- ITM (femme inter associations, inter services migrants), cette exposition se fait le relais des innombrables cris de victimes étouffés par l’indifférence qu’a longtemps suscité le sujet au sein du débat public, ainsi que le rappelle Thérèse, militante de longue date contre les nombreuses violences et injustices que continuent de subir aujourd’hui la moitié du genre humain.

 

Les violences domestiques envers les femmes, mises en images sous forme de bande dessinée géante dont chaque planche s’étire le long d’un kakemono de 2m de haut… C’est actuellement ce que vous pouvez découvrir au cœur du hall d’exposition de la M.J.C. du Laü. Peut-être est-ce là ce dont a besoin cette cause pour attirer l’œil et être considérée par le public avec l’attention qu’elle mérite… Déambulant dans le hall de la M.J.C du Laü, on suit le fil d’une histoire aussi sinistre que terriblement banale : l’isolement, la culpabilité, le désespoir d’une femme face à son conjoint qui la bat, dépeint sous les traits allégoriques du Minotaure… Au-delà des violences physiques et psychologiques infligées à la victime, c’est aussi le regard des proches qui est ici dénoncé : entre désarroi, refus de « s’immiscer dans la vie privée d’autrui », voire jugement condescendant (pourquoi cette femme se laisse-t-elle traiter ainsi ?), les réactions classiques de monsieur et madame tout le monde sont dépeintes dans leur vérité crue, celle qui préfère ne pas voir, pour ne pas trop encombrer sa conscience.

« Au-delà de son originalité, cette mise en forme de l’exposition sur des planches de bande dessinée géantes a surtout le mérite de rendre accessible son propos à tout un chacun, explique Thérèse. On comprend très bien comment s’installe progressivement ce rapport de bourreau à victime au sein d’un couple, tout comme l’isolement, le désespoir et la culpabilité s’emparent de ces femmes, brisent leur estime personnelle et rongent leur joie de vivre. L’un des points forts de l’exposition repose également sur le recueil de paroles véridiques des victimes, au sein de nos réseaux associatifs. Certains de ces témoignages seront d’ailleurs visibles sous la forme d’une projection vidéo le 25 novembre à la M.J.C. ».

Militante de la première heure au sein de diverses associations, dont la maison des femmes qu’elle a co-fondée, Thérèse AUCLAIR s’est toujours battue pour l’égalité homme-femmes, l’interculturalité, la laïcité et contre les discriminations ou les violences quelles que soient leurs formes. Une pionnière des causes féministes comme en témoigne son long parcours associatif et militant, sur lequel nous reviendrons prochainement à l’occasion d’un portrait dédié. De cette expérience, Thérèse en tire un regard aguerri sur l’histoire des droits des femmes et leur évolution. « Pendant très longtemps la question de la violence envers les femmes a été tout simplement éludée. Les mots donnent corps à la réalité : quand vous qualifiez de « crime passionnel » un homicide, vous édulcorez complètement la gravité de ce meurtre. Le mot féminicide n’est apparu que très récemment, 4 ou 5 ans, alors qu’on en dénombre plus de cent par an… ce n’est là qu’un des très nombreux exemples qui montre le manque de considération accordée en général aux femmes. Cela ne date pas d’hier… Si l’on s’en réfère aux religions du livre, une femme naît coupable, c’est le péché originel. Elle a longtemps été considérée comme une possession d’ailleurs, que ce soit religieusement au légalement, sous le code civil de Napoléon par exemple… Le « devoir conjugal » a longtemps interdit toute législation au sujet du viol conjugal par exemple. Quant au viol tout court, il n’a été reconnu comme un crime que depuis une dizaine d’années seulement… Autant de raisons qui expliquent aujourd’hui le poids d’un héritage dont il nous faut nous défaire au XXIème siècle. L’égalité homme femme est un combat qui doit être mené par tous, pas seulement par la gente féminine, car c’est un enjeu de société général ! Tout individu a le droit à la dignité, au respect de ses droits et à l’égalité. »

Il en va de même pour les violences conjugales, il s’agit d’un enjeu de santé publique : la seule enquête diligentée par l’État sur le sujet l’a bien montré : ce fléau touche absolument toutes les classes sociales, même les plus jeunes, notamment chez les étudiants, contrairement à ce que l’on pourrait croire. Il y a beaucoup de représentations biaisées sur ce sujet. »

Raison de plus pour vous rendre au Laü et découvrir cette exposition remarquable, forte de ses visuels aussi saisissants de vie et ses paroles véridiques. Réalisée par Calenn, la graphiste et comptable du réseau FIA, « cette bande dessinée sonne tout simplement juste, confie Thérèse, en parvenant à expliquer toute la complexité et la gravité de ces situations en quelques planches. Tout y est dit ».

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