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LES ÉMERGENCES DU LAÜ : Table ronde/débat « Pourquoi une nouvelle loi Immigration Asile ?»

Une table ronde pour comprendre la réalité des phénomènes migratoires en France.

 

Alors qu’un nouveau projet de loi est annoncé par le gouvernement pour légiférer sur l’immigration et l’asile en France, le Collectif pour le Respect des Droits des Etrangers, (qui regroupe une douzaine d’associations militantes locales), propose, en partenariat avec la M.J.C. du Laü, une table ronde dédiée à ce sujet. Présentant des intervenants de haute volée, tels que François Héran, sociologue professeur au collège de France et auteur de plusieurs ouvrages sur la question migratoire, Anna Sibley, juriste chargée d’étude au Gisti (Groupe d’Informations et de Soutien aux Travailleurs Immigrés) et Henri Masson, président de la Cimade, cet évènement nous propose d’interroger la pertinence de ce projet législatif en prenant le temps de comprendre les enjeux et la réalité des phénomènes migratoires aujourd’hui.

 

Le CRDE : l’union fait la force

Créé en 1987, pour militer contre la loi Pasqua qui permettait l’expulsion de jeunes migrants vers le pays d’origine de leurs parents, le Collectif pour le Respect des Droits des Etrangers, ou CRDE, regroupe une douzaine d’associations locales militantes qui partagent un même combat : défendre les droits et la dignité des étrangers sans papiers et les aider au mieux dans leur parcours migratoire.

« Au-delà des fortes valeurs et convictions partagées qui fondent son socle, d’ailleurs matérialisées par une charte cosignée, l’une des grandes forces de ce collectif repose justement sur la diversité de ses champs d’actions et d’expertise », explique Vincent Cabanel, membre du CRDE et animateur de cette future table ronde.  « Droit et expertise juridique, connaissance des administrations et institutions, recherches et études de terrain, réseaux solidaires à différentes échelles… Parce qu’elle se traduit par une grande complémentarité de ses savoir-faire et domaines de prédilections, la coordination de son collectif confère au CRDE une légitimité et une reconnaissance sur la scène politique ou institutionnelle ce qui lui donne aussi du poids dans ses rapports de force avec ces différents acteurs. Plus concrètement, cela se traduit aussi par des ressources variées et complémentaires mise au service des différents migrants soutenus par une ou plusieurs associations du collectif. Enfin c’est aussi cette capacité à puiser dans ses différents champs d’expertise qui permet au CRDE de remplir au mieux l’une de ses principales missions : expliquer le plus précisément possible au public les dynamiques et enjeux des phénomènes migratoires, montrer, chiffres à l’appui, cette réalité dans toute ses nuances et sa complexité, à travers plusieurs perspectives, mettre en lumière la diversité des parcours et situations migratoires… Tout l’inverse en somme de certains discours politiques ou idéologiques qui tendent à simplifier, tronquer voire déformer cette réalité pour mieux l’utiliser électoralement. C’est d’ailleurs le but de cette table ronde : à travers l’examen de ce projet de loi et surtout de sa pertinence, l’idée est de partager l’expertise du collectif sur les lois qui existent déjà et le contexte migratoire actuel dans lequel elles s’inscrivent aujourd’hui.

 

Tordre le cou aux idées reçues

C’est un fait assez méconnu mais l’opinion publique française est majoritairement en faveur de la régularisation des sans-papiers, bien que cette avance reste faible (53% pour contre 47 contre). Un résultat que je trouve très intéressant dans la mesure où il illustre que, face aux nombreux messages idéologiques et démagogiques de certains politiques, les gens restent avant tout rationnels, ils ne sont pas idiots.  Raison pour laquelle il est aujourd’hui primordial de délivrer des informations factuelles, vérifiées et sourcées pour rétablir la vérité sur des questions trop souvent traitées de manière biaisée, de façon à aborder ces questions en les replaçant au cœur des différents contextes (économiques, politiques, idéologiques etc…) qui les sous-tendent. Le terme « migrant » d’ailleurs est très révélateur de cette simplification démagogique de la réalité. Un seul terme pour désigner des statuts, des parcours, des pays d’origine ou des situations extrêmement variées. C’est un mot fourre-tout idéal pour instiller la peur et dresser des caricatures.

La peur des migrants est de trois ordres, en schématisant : économique, sécuritaire et identitaire.  Chacune de ses peurs peut pourtant être facilement dissipée par la raison, dès lors qu’on se penche un peu dessus. Économiquement parlant, les migrants rapportent bien plus qu’ils ne coûtent, de nombreuses études le montrent avec clarté. Ce sont souvent des individus qui ont tout laissé derrière eux pour seulement une chance de survivre, ils ne demandent qu’à travailler et créer de la richesse ! La question sécuritaire est indissociable du contexte social. Oui la misère crée de la violence et de l’insécurité, mais ce n’est pas un scoop, dès lors que l’on sort de ces contextes de pauvreté la violence s’évapore ! Quant à la question identitaire, là encore l’écart entre les préjugés et la réalité se donne à voir. Une étude sociologique récente montre que dans leur grande majorité, les migrants adoptent très vite la culture de leurs pays d’accueil, ils cherchent l’intégration.  Il me paraît important de réhumaniser cette réalité en montrant les visages, les vies, les histoires que représentent toutes ces statistiques. Il est frappant de voir à quelle vitesse les bénévoles se rapprochent des migrants dans les associations, autour d’un café, d’un billard ou de simples conversations. Il faut bien-sûr faire attention à ne pas tomber dans une démarche de « Zoo », mais j’invite tout un chacun à venir rencontrer ces personnes, à s’intéresser à elles, à échanger tout simplement. Bien des idées reçues s’effondrent lors de ces rencontres.

 

Des intervenants de haute volée.

« A l’image des associations qui constituent le CRDE, les intervenants de la table ronde font montre d’une grande diversité de leurs champs d’étude, ce qui permettra justement de croiser différentes perspectives pour appréhender au mieux les interrogations soulevées.

François Héran

Professeur au Collège de France, titulaire de la Chaire « Migrations et Société » depuis 2017, sociologue, anthropologue et démographe, François Héran est avant tout l’auteur de plusieurs ouvrages aussi documentés qu’accessibles, dédiés au thème des migrations. « Son dernier livre « immigration, le grand déni » souligne à quel point les représentations et la réalité diffèrent à propos des phénomènes migratoires en France, dès lors que l’on prend le temps d’examiner sérieusement ce sujet, explique Vincent. L’immigration est aujourd’hui un mot épouvantail dont on se sert quotidiennement en politique, une véritable obsession dont l’auteur montre avec courage et rigueur scientifique le non-sens. C’est une position à la fois scientifique et courageuse. »

Henri Masson

Il est né dans les premiers camps de réfugiés de Gurs et occupe aujourd’hui le poste de président de la Cimade, une association historique dont l’expertise est largement reconnue en terme de rigueur dans son organisation et son recrutement.  Les résultats de ses enquêtes font très souvent référence nationalement, le tout avec une approche des plus humanistes.

Anna Sibley

Elle est une juriste, chargée d’étude au GISTI (Groupe d’Informations et de Soutien aux Travailleurs Immigrés). Source incontournable d’expertise juridique et politique pour les associations de défense des étrangers, le GISTI a publié de nombreuses publications reconnues, et régulièrement actualisées, elles constituent une véritable « bible » pour les militants du secteur. L’association est née en 1972 de la rencontre entre des travailleurs sociaux, des militants associatifs en contact régulier avec des populations étrangères et des juristes. Cette double approche, à la fois concrète et juridique, fait la principale originalité du groupe.

 

Une première partie sous les feux de la rampe

 

Pour introduire cette table ronde, un duo de danseurs composé de Sophie Gamba Lautier, danseuse et professeur de danse (d’expression africaine) à la M.J.C. du Laü et Andy Scott Ngoua danseur professionnel, nous proposera une performance chorégraphiée, avec l’intention de mettre en scène le vécu des migrants sur leur parcours. Derrière les chiffres et statistiques à travers lesquels se donnent à voir au public les migrants, ce sont des vies, des rêves et des espoirs qui apparaissent dès lors que l’on prend le temps de regarder et les considérer humainement. Ayant lui-même connu un parcours migratoire, Andy Scott Ngoua prêtera sa voix, en fond sonore, à cette performance artistique qui cherche à nous faire traverser sa frontière.

Vendredi 13 octobre 23023 à 19H, un évènement ouvert à toutes et tous !

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