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REVEILLON SOLIDAIRE : QUAND LA CHALEUR DES COEURS ILLUMINE L’HIVER

Initié en 2003 par l’Association culture et tradition d’Afrique et d’ailleurs et depuis 2006 porté, développé et coordonné par le le Club d’initiatives solidaires de la maison pour tous Léo- Lagrange et leurs partenaires, le réveillon solidaire apparaît comme une action unique en France, où brille l’esprit de partage et de solidarité. Mobilisant près de 80 bénévoles et soutenus par différents acteurs locaux ( entreprises, magasins, associations mais aussi la ville de Pau, son principal financeur) l’événement invite son public à un réveillon chatoyant de guirlandes, mets gastronomiques traditionnels, animations et concerts de qualité adressés aux enfants comme aux adultes, le tout pour une participation de 2 euros symboliques et d’un plat ou une boisson à partager avec les autres convives. Cette manifestation qui chaque année rassemble au moins 500 personnes dans la grande salle du parc des expositions palois a pour principales intentions la lutte contre l’isolement et la mise à l’honneur de la solidarité en favorisant la mixité sociale et la rencontre grâce à l’atmosphère festive, chaleureuse et conviviale qui y règne.

 

Le prix de la dignité

Le principe est simple : pour 2 euros (ou d’avantage pour les personnes désireuses de contribuer plus largement à la solidarité de l’événement- gratuit pour les enfants de 13 ans ou moins) et l’apport d’une boisson et d’un plat à partager avec le public présent, on participe à un véritable réveillon, qui n’a rien à envier à d’autres manifestations privées bien plus onéreuses : décorations chatoyantes, plats gastronomiques offerts par les commerçants palois, espace de jeux et d’animations pour enfants, concerts, etc… rien n’est laissé au hasard.

« Ce prix d’entrée joue d’abord un rôle de filtre psychologique qui nous permet de toucher en priorité notre « public cible », les personnes relevant des minima sociaux, nous explique tout sourire le directeur de Léo Lagrange Pau Abdelaziz Bendhama, ou « Abdé » comme il invite chaleureusement ses interlocuteurs à l’appeler d’emblée. Dans l’esprit des gens, ces 2 euros connotent un événement populaire, tout comme le nom de « réveillon solidaire », ce qui évite les « effets d’aubaine » en cela que venir à ce type d’évènement implique forcément d’en partager l’esprit solidaire. Cela dit, il est possible de donner plus ce qui laisse aussi la porte ouverte aux esprits philanthropes, qui souvent viennent avec leurs enfants dans une perspective pédagogique de transmission des valeurs humanistes. L’idée est d’abord d’avoir le sentiment de participer, à hauteur de ses moyens bien-sûr, pour se percevoir comme « légitime » à sa table, comme lorsqu’on est invité à repas. C’est aussi pour cela que l’on incite chacun à amener un plat (cela va de la boite de petits poids au saumon fumé), pour susciter ce ressenti de participation et donc d’utilité, de mérite en quelque sorte : on les réconcilie avec cette estime de soi et cette fierté, qui est souvent abîmée. Donner est aussi important, si ce n’est plus, que de recevoir. Le présent choisi importe peu, c’est le symbole qui prime ici. Les plats apportés sont amenés en cuisine où ils seront reconditionnés et resservis sur le buffet collectif dans la mesure du possible. L’important est qu’ils soient partagés par les autres, on ne consomme pas ses propres plats, ce qui permet d’offrir le plaisir d’offrir. »

 

Par le mélange, l’échange

Une autre des principales visées de l’action réside d’ailleurs dans cette aspiration à la mixité sociale et à l’échange avec l’autre. « Nous tenons absolument à éviter l’effet « guetto » que produirait la présence d’un seul type de public. Grâce au réseau de partenaires de l’action, le club d’initiatives solidaires de Saragosse et le Centre Communal d’Actions Sociales nous parvenons à brasser ici un public assez large, provenant de différents endroits et relevant de différents milieux, moyens économiques ou situations : des familles vivant dans « les quartiers », des personnes désocialisées, dépourvues de domiciles, âgées, veufs ou veuves, des familles monoparentales mais aussi des personnes désireuses d’adhérer à cet esprit solidaire qui viennent passer un bon moment. Lors des inscriptions, nous demandons d’ailleurs aux participants de s’ouvrir aux autres, que ce soit dans la posture ou l’accueil de personnes isolées sur les grandes tablées de 8-10 personnes. Récemment, nous avons aussi cherché à inclure les jeunes fréquentant notre structure dans la mise en œuvre de l’événement. Ce n’est pas un public qui participerait de lui même, si ce n’est en famille, à cette action, alors l’équipe d’animation a monté un atelier jeune ou, via un vidéo-maton, ces derniers ont eu pour tâche de recueillir les impressions et retours des participants. Ce type d’initiatives renforce aussi la mixité sociale ».

 

Un véritable réveillon

S’il est primordial de toucher les populations les plus en difficulté, il faut cependant que tout se passe bien pour tout le monde, raison pour laquelle un service de sécurité est présent à l’entrée pour éconduire les personnes alcoolisées. Abdé est lui-même présent à l’entrée pour accueillir les participants avec le sourire et soutenir les salariés et bénévoles présents. « L’intention est aussi de donner le sentiment de participer à une « véritable » fête, pas à un événement « papier crépon » avec un effet « cheap » ou « soupe populaire » ». Grâce aux partenaires et financeurs de l’action, une véritable chaîne solidaire se met en place. C’est la ville de Pau qui finance très largement l’action mais des commerces et entreprises locales mettent aussi la main à la patte, par le don de plats par exemple (foie gras, saumon et huîtres) ou le prêt de matériel, à l’image d’Emmaüs qui équipe les cuisines en électroménager, les espaces de détente en canapés et assure la logistique de transport.

« Il faut se rendre compte de l’énorme travail abattu par les équipes bénévoles lors de la préparation et de la mise en œuvre de ce réveillon dans cette perspective. Tout est fait pour que l’événement soit une réussite, que les gens passent un réel moment de fête, qu’ils soient au centre de toutes les attentions. On a le réel souci de leur bien-être, que ce soit dans l’accueil, la confection et le services des plats, tout comme dans les animations proposées. Les bénévoles se donnent vraiment à cœur dans cette tâche, ils finissent souvent « sur les rotules » et le public en a d’ailleurs bien conscience, il suffit d’entendre les tonnerres d’applaudissements lors de leur passage sur scène pour les remerciements ! »

 

Solidarité, j’écris ton nom

Quelques 80 bénévoles participent au bon déroulé de ce réveillon répartis en équipes dédiées à un secteur (cuisine, salle etc..). « Il y a un noyau dur de bénévoles qui renouvellent leurs engagements d’une année sur l’autre, souvent des retraités qui disposent du temps libre requis pour assurer un tel investissement. C’est principalement parmi eux que l’on nomme les responsables de secteur, qui auront à charge de diriger les équipes. Cela permet aussi de rassurer les nouveaux venus qui sont ainsi libérés de cette responsabilité et aussi de mélanger socialement les différentes équipes. On leur explique la philosophie générale de l’action, leur présente les différents espaces de travail. Il y a un véritable exercice de transmission ici, avec l’idée de relève si les nouveaux renouvellent leur engagement sur les prochaines éditions. Le CCAS sélectionne aussi en amont des volontaires parmi les populations marginalisées ou désocialisées que l’on répartira dans les différents secteurs, en nombre réduit pour pouvoir leur donner l’accompagnement et l’attention nécessaire au bon déroulé de leur intervention ». Les bénévoles s’engagent sur plusieurs jours, un travail conséquent mais qui apporte une réelle satisfaction.

« Lorsque j’ai commencé cette action, j’appréhendais un peu mon travail auprès des populations marginalisées, confie Evelyne Rodriguez, salariée de cap solidaire depuis 2003, mais aujourd’hui c’est beaucoup plus un plaisir qu’une contrainte ! ». Pour Abdé, la réussite de ce réveillon tient aussi à sa perpétuelle amélioration d’une année sur l’autre. « les bénévoles sont très critiques envers eux-mêmes, ce qui traduit leur volonté de donner le meilleur d’eux-mêmes. Léo Lagrange a l’éducation populaire dans son ADN, ce qui, au delà des valeurs ici défendues, se traduit dans la construction de cet événement et sa bonification d’édition en édition. Le savoir faire est ici transmis horizontalement, il n’est pas descendant. Il y a un véritable travail critique mené par les équipes, secteur par secteur, pour s’améliorer, où chacun a voix au chapitre et donne son avis, son retour d’expérience, ses impressions dans cette perspective. Depuis sa création, le réveillon solidaire a beaucoup évolué, ce qui traduit directement le résultat de cette approche empirique, où l’on cultive l’expérience partagée et les regards croisés. Beaucoup de choses ont ainsi été améliorées pour offrir à chacun le meilleur de soi-même et des autres ».

 

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