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Andréas GUYOT, le goût des autres

Andréas GUYOT fait partie de ces personnes dont le parcours riche associatif, réalisé en grande partie au sein du Laü, illustre le cœur de projet de la structure tout comme ses valeurs. Ami de première heure avec quelques-uns des pionniers associatifs du Laü, comme Louis Crozat, Serge Fontaine ou Jean-Louis Munoz, il imagina et mis en forme plusieurs activités adressées à tous, selon un esprit marqué par l’éducation populaire.  

Aujourd’hui porteur d’une nouvelle idée d’activités autour de la découverte des plantes qu’il animera cette année, il revient avec nous sur son parcours au sein de la M.J.C. et ravive de beaux souvenirs associatifs partagés.  

 

Entre amitié, partage et convictions : les premières initiatives associatives 

« J’ai connu la M.J.C. avec ses « pionniers » qui étaient mes amis et que je n’ai jamais perdus de vue, malgré nos 70 ans aujourd’hui. Nous partagions tous ce plaisir du faire-ensemble, à travers l’associatif, qui était alors en plein développement. En 1976 nous avions fondé une association, « Transhumance Horizon » dédiée aux sports de montagne que nous pratiquions tous : ski de fond, escalade, canyoning etc…  Louis Crozat (éducateur puis directeur de la M.J.C. Fouchet-Dufau, qui deviendra le Laü) nous avait embarqués dans une drôle d’aventure : il avait acheté une grange situé dans le cirque de Gavarnie et nous avait motivés dans le projet de sa restauration. S’il en était le propriétaire, Louis voyait ce petit bâti comme « une maison bleue », utilisée en partage. Beaucoup de monde y est passé, dont des jeunes de la M.J.C. en excursion avec leurs animateurs. J’ai énormément de souvenirs de camaraderie liés à cet endroit, dont quelques soirées qui nous laissèrent de beaux maux de crânes » s’amuse Andreas.   

Depuis toujours, Andréas cultive un goût pour la nature et notamment la faune et la flore des environs. Un fil rouge autour duquel s’est construit son parcours aux couleurs de l’éducation populaire dans le monde associatif, entre hasards, rencontres et convictions. « En 1978, une marée noire d’une grande envergure frappait le littoral de la Bretagne, un véritable désastre. Indigné et révolté face à cette catastrophe, je suis allé avec mes deux enfants pour nettoyer les plages, j’habitais à Pau alors. Nous ne pouvions œuvrer qu’à marée basse, ce qui nous laissait inactifs lorsqu’elle était pleine. Une M.J.C. locale nous avait alors sollicités afin de compter et répertorier les oiseaux morts, victimes de cette horreur, ce que nous avons fait. Cela m’a donné envie de m’intéresser à ceux qui étaient vivants et je me suis découvert une passion pour l’ornithologie ».  

 C’est cet amour des oiseaux qui pousse Andréas à revisiter les paysages qui nous entourent en apprenant à observer sa faune et sa flore. « En excursion aux Majos de Riglos (Aragon), j’ai croisé par hasard Jean Louis Munoz, alors directeur de la M.J.C. du Laü. J’observais alors les oiseaux, et en m’écoutant lui en parler, il m’a proposé de partager ce goût pour l’ornithologie au sein d’une activité, afin d’en faire profiter d’autres personnes. L’idée m’a bien plu, et elle se concrétisa entre 1986 et 92, à travers « regarder vivre les oiseaux », une activité que j’ai animé avec beaucoup de plaisir », ainsi que la fondation d’une petite revue « la bergeronnette » dédiée à l’observation des oiseaux entre l’Espagne et Pau.  

Andréas évoque en ces termes ce souvenir prégnant qu’est la découverte du Majos Rigolos, en Aragon. « On tombe dans un autre monde. On y voit des tulipes sauvages (ancêtres des tulipes de culture), et d’autres fleurs rares, parfois tellement petites qu’il est facile de passer à côté. Cela invite à regarder autrement, plus attentivement ce monde qui nous entoure et donne à voir toute sa splendeur à qui prend le temps de regarder ». Alors même qu’il animait bénévolement ces projets, où il donnait à voir la nature avec un regard passionné, Andreas ne se considère pas comme un « militant », comme s’il était naturel de partager ainsi ces choses essentielles. Une humilité qui rappelle peut être à quel point donner aux autres équivaut aussi à recevoir.  

 

Une décennie avec les baleines  

C’est encore via une rencontre fortuite, mais avec des cétacés cette fois, que se lança une autre aventure humaine qui fait encore aujourd’hui la fierté d’Andreas : la découverte des baleines. « Là encore, tout part d’un oiseau explique-t-il en riant. J’étais parti observer le « petit puffin », un oiseau de mer visible au large des côtes. Nous avions embarqué avec des amis sur un ferry faisant la liaison entre Bilbao et Portsmouth pour marquer le changement de millénaire, le passage à l’an 2000. J’y ai vu des baleines nager à nos côtés dans le golfe de Gascogne, une pure merveille. Ce que je pensais dû au hasard était en fait très commun à cette saison, entre août et septembre. En discutant avec Jean-Louis de cette aventure, il m’a alors proposé de partir avec une animatrice et des jeunes du foyer des adolescents du Laü pour une sortie. L’excursion a tellement plu que nous avons décidé d’en faire une véritable activité. Entre 2000 et 2010, 1820 personnes ont pu ainsi faire ce voyage avec nous : en partance de Pau, prendre un bus vers Bilbao et passer 3 jours en mer au cours desquels se montraient ces magnifiques animaux marins. Ce qui me rend le plus fier c’est d’avoir permis à des personnes et familles très modestes d’embarquer avec nous dans cette aventure. Cela n’aurait jamais pu se faire dans une autre structure de nature différente que la M.J.C. du Laü et pour cause : le voyage était proposé à prix coûtant, 175 euros afin de permettre à tous d’y accéder. Cela créait aussi une mixité sociale à bord, soudée par un émerveillement partagé. Nous avons été contraints d’arrêter ces excursions lorsque cette ligne a été fermée en 2010. On aura emmené des familles aux revenus modestes, qui rêvaient du large devant la télévision. On leur permettait de payer en 4 fois pour qu’elles puissent vivre cette aventure. J’ai notamment le souvenir d’une grand-mère, de sa fille et petite-fille qui avaient embarqué grâce à cette facilité et vécu ce voyage de façon transgénérationnelle : cela n’aurait pas été possible ailleurs. C’est quand même formidable de pouvoir offrir ces expériences à des gens et de lire la joie sur leur visage. Je me souviens de l’esprit de fête et d’émerveillement qui régnait à bord. Sur les 1820 personnes qui ont participés à ces escapades maritimes, je n’ai jamais, pas une seule fois, reçu de retour négatif ! C’est quelque chose qui encore aujourd’hui, dix ans plus tard reste prégnant dans ma mémoire et me manque énormément.

Lorsque tu as la chance d’avoir une structure comme le Laü, assez souple pour soutenir et donner corps aux idées des gens, on peut se mettre à rêver, des rêves un peu fous. Grâce à la M.J.C. j’ai pu partager ma passion pour les oiseaux, emmener des familles, gens modestes et plus aisés découvrir ensemble les baleines en train de nager en plein large et aujourd’hui, imaginer une activité autour des végétaux, issue d’une idée cueillie lors d’une simple balade.  

 

Les plantes d’ici et d’ailleurs : des trésors à portée de regard 

Aujourd’hui retraité des espaces verts de Pau, service au sein duquel il travailla 10 ans, Andréas a l’idée de proposer une nouvelle activité, dédié à son premier amour : celui des plantes. D’où lui vient ce goût pour les fleurs et les plantes ? Une madeleine de Proust. « J’avais 17 ans, se souvient-il, et rendais souvent visite à ma grand-mère qui s’était liée d’amitié avec une « bonne sœur ». Elles m’amenaient avec elles pour aller cueillir les plantes nécessaires à la confection de « la bénédictine », une liqueur artisanale. C’est lors de ces escapades que j’ai découvert et développé mon goût pour la flore. Depuis 1976, c’est une passion qui ne m’a jamais quitté.  

Nul besoin d’escapades transpyrénéennes cependant pour découvrir les trésors floraux, il suffit d’apprendre à observer ceux que nous foulons tous les jours du pied en sortant de chez nous !  

L’idée de son activité, Andréas la tient du confinement. « Il y avait une restriction limitant les sorties à 1 km du foyer. Au cours d’une promenade aux alentours de chez moi, j’ai remarqué une fleur sur ma pelouse, que j’ai prise en photo en me demandant qu’elle était son espèce. J’ai alors décidé de faire une photo de fleur par jour, et de voir où cela me mènerait. J’en suis aujourd’hui à 90 plantes répertoriées, je ne soupçonnais pas une telle richesse florale juste à côté de nous ! Je prends conscience que nous n’avons pas besoin de faire 50 km pour en voir autant. J’ai montré à la ville ma liste de plantes pour voir si cette démarche les intéressait, ce qui a été le cas, à tel point qu’ils m’ont demandé si je pouvais renouveler ce travail dans d’autres endroits. L’idée a alors fait son chemin jusqu’à devenir celle d’une sortie régulière proposée par le Laü où je pourrais partager avec d’autres ce plaisir de la découverte dans le cadre d’une activité accessible à tous et agréable à suivre.  

L’idée est aussi d’alimenter de photos et commentaires avec les participants un blog dédié à ces plantes locales. C’est aussi d’apprendre à observer, de prendre le temps de prêter attention à ce qui nous entoure et devant quoi on peut passer tous les jours sans faire attention. Je me réjouis que l’éveil des « consciences vertes » soit dans l’air du temps aujourd’hui.  

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